mercredi, février 22, 2006

Appel - Sauvons le MRAX!

Le Mouvement contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Xénophobie, est une référence historique importante dans le combat mené contre le racisme en Belgique.

La vigueur de l’extrême droite dans notre pays atteste que ce combat est loin d’être gagné. Force nous est aussi de constater la difficulté de poser un débat serein et prospectif sur des questions de racisme dans une cacophonie où l’anathème et le procès d’intention empêchent toute possibilité de réflexion de fond. Quant à la condition de nos concitoyens nouvellement arrivés, comme de celle des personnes d’origine subsaharienne ou des Roms, pour ne citer que ces deux populations, elles font, malgré des signaux extrêmement inquiétants, l’objet d’un silence assourdissant.

Plus globalement, les défis nouveaux posés par une mondialisation qui se décline également en tentations de repli identitaire et d’établissement de forteresses divisant l’humanité entre riches et pauvres sont des vecteurs virulents de contagion du racisme et de la xénophobie.

Dans ce corps à corps contre la peur ou la haine de l’Autre, chaque pas en retrait est un pas de trop. Aujourd’hui, c’est la perte de légitimité et de crédibilité d’un symbole important de la lutte antiraciste ainsi que la dislocation d’une association plus que jamais nécessaire que nous voulons empêcher.

En effet, la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie suppose d'une association et de ses militants d'avoir des valeurs et des principes forts et dénués de toute ambiguïté, comme elle exige des positions claires et cohérentes. C'est ce qui fonde sa crédibilité. Or aujourd'hui, le MRAX ne peut plus se prévaloir d'une position forte et sans ambiguïté. De même qu'il ne souffre aucune critique, tétanisé par la peur d'écorner l'image "idéalisée et figée" de l'association alors que le MRAX est devenu un lieu de polémiques stériles et de dissensions récurrentes entre les militants antiracistes.

La gestion du MRAX, unanimement dénoncée par le personnel dans ses courriers aux membres des 6 février et 16 mars 2006, s’est notamment traduite par le départ de plus de la moitié des employés et a conduit aux premières grèves de l’histoire de l’association. Ces départs ont des effets désastreux sur l’image du MRAX ainsi que des répercussions graves sur la continuité et l’efficacité de son action.

L’absence totale de transparence autour des positions controversées de plus en plus souvent prises par la direction actuelle pose problème pour nombre de membres, sympathisants et militants antiracistes.

Ainsi en est-il, entre autres exemples, du soutien répété par le MRAX, en la personne de son président, au pouvoir non démocratique marocain, causant ainsi un préjudice grave à la neutralité et à l’indépendance de l’association. Cette situation a d'ailleurs été clairement dénoncée par de nombreux démocrates belges et marocains (1).

Par ailleurs, des acteurs associatifs et politiques d’horizon divers peuvent attester du sabotage par le président du MRAX d’initiatives en faveur des migrants subsahariens particulièrement quand celles-ci sont susceptibles d’écorner l’image du pouvoir marocain (2).

Quelles que soient les analyses et les nuances apportées par les uns et les autres sur ces questions, il convient de constater que la légitimité de la présidence actuelle, du CA et de la direction du MRAX est sérieusement remise en cause. Cette situation à elle seule suffit à nous préoccuper au plus haut point.

Nous appelons donc les militants, les membres et les sympathisants du MRAX à prendre conscience et à réagir à ce déficit de crédibilité et à la dégradation sensible de l'image de l'association ainsi que du tort considérable qui nous est fait dans notre combat commun.

Nous en appelons enfin au conseil d’administration du MRAX afin qu’il prenne ses responsabilités, et qu’il tire les conclusions du fait qu’une partie importante du mouvement antiraciste le conteste, en présentant de manière honorable et constructive sa démission.



> Mateo ALALUF (professeur ULB, membre du MRAX),
> Mohamed ALLOUCHI (animateur et comédien),
> Nicolas ANCION (écrivain),
> Ali BAYAR (Professeur ULB),
> Guy BADOUX (Coordination SOS Migrants),
> Joëlle BAUMERDER (dir. Maison du Livre, membre du MRAX)
> Marie-Noëlle BEAUCHESNE (sociologue, membre du MRAX),
> Mustapha BENTALEB (militant associatif),
> Marie-Carmen BEX (membre du MRAX, commissaire aux comptes),
> Mathieu BIETLOT (chercheur ULB et membre du MRAX)
> Irma BOZZO (assistante sociale, ex-administratrice du MRAX)
> Isabelle CARLES (juriste, membre du MRAX),
> Karim CHERRADI (ex-employé, membre du MRAX),
> Souhail CHICHAH (chercheur ULB, membre du MRAX),
> Laure de HESSELLE (journaliste),
> Céline DELFORGE (Parlement bruxellois),
> Thierry DELFORGE (radio Air Libre),
> Stéphanie DEMOULIN (chercheuse psychologie sociale UCL),
> Anne-Marie DIEU (Chargée de recherche EGID - Etudes sur le genre et la diversité en gestion, HEC-ULG)
> Josy DUBIE (sénateur, membre du MRAX),
> Pierre ERGO (journaliste à l'Association européenne pour l'information sur le développement local),
> Fanny FILOSOF, membre du Colfen (collectif femmes en noir contre les centres fermés et les expulsions)
> Pascale FONTENEAU (écrivain),
> Laïla FOULON (coordinatrice artistique Zinneke Parade),
> Carole GRANDJEAN (ex-directrice, membre du MRAX),
> Pierre GALAND (sénateur),
> Marianne GRATIA (ex-employée, membre du MRAX),
> Bernard HENGCHEN (prof. à l'Institut Cardijn, administrateur du MRAX)
> David JAMAR (chercheur sociologie ULB),
> Richard KALISCZ (metteur en scène, professeur à l’INSAS et membre démissionnaire du MRAX),
> Shanan KHAIRI (historien, interne en médecine)
> Linda LEWKOWICZ (auteure),
> Henri LIEBERMANN (membre du MRAX),
> Arnaud LIEGEOIS (Chercheur psychologie sociale, UCL)
> Pierre LORQUET (auteur, membre du MRAX),
> Xavier LÖWENTHAL (éditeur, La Cinquième Couche éd.)
> Nicole MAYER (sociologue, membre du MRAX),
> Claude MERTENS (fonctionnaire),
> Aziz MKICHRI (S.O.S. Migrants),
> Anne MORELLI (historienne, membre du MRAX),
> Serge NOËL (écrivain, S.O.S. Migrants),
> Nouria OUALI (chercheuse ULB, membre du MRAX),
> Claire PAHAUT(Démocratie ou barbarie),
> Pierre-Arnaud PERROUTY (ex-employé, membre du MRAX),
> Julien PIERET (juriste, chercheur ULB)
> Marcel POZNANSKI (acteur associatif Matonge),
> Andrea REA (professeur ULB, membre du MRAX),
> Eric REMACLE (professeur ULB),
> Isabelle RORIVE (chargée de cours ULB, membre du MRAX),
> Sylvie SOMEN (dir. Théâtre Varia),
> Jean-Philippe SCHREIBER (prof ULB, membre du MRAX),
> Isabelle STENGERS (philosophe, prof. à l'ULB)
> Lise THIRY (professeure émérite ULB),
> Cedric TOLLEY(chercheur ULB, membre du MRAX),
> Marie Van KEIRSBILCK (ex-employée, membre du MRAX)




(1) Voir notamment ci-dessous la lettre ouverte adressée aux membres et sympathisants du MRAX par N. Ouali et S. Chichah, chercheurs à l’ULB.
(2) Voir notamment ci-dessous les témoignages de membres fondateurs du collectif S.O.S. Ben Younech.