Voilà 8 ans que les
travailleurs du MRAX, soutenus par une cohorte de militants associatifs,
dénoncent les dérives de leur association. Bilan social : licenciements à gogo
(plus de 200% des travailleurs ont été remplacés), de sorte que la charge
psychosociale de ceux qui y sont aujourd'hui est énorme. Bilan politique :
depuis 2004, l'assemblée générale a été peu à peu vidée d'une grande partie de
ses membres (ils étaient près de 300, il en reste à peine 10% aujourd'hui). Des
dizaines d'administrateurs s'y sont succédés, tous ont fini par également
s'enfuir, parfois avec fracas (plusieurs lettres ouvertes sont encore sur la
toile), souvent en silence car pris de malaise pour avoir trop longtemps
soutenu l'homme qui (dé)tient presque à lui seul l'asbl, Radouane
BOUHLAL. De communiqué en communiqué, les travailleurs dénoncent
ouvertement par le biais de leurs organisations syndicales, qu'ils ne reçoivent
plus de travail et que leur direction, quand elle est présente, les
ignore. Dans les faits, le MRAX ne fait pratiquement plus rien et n'a
plus aucun crédit dans la presse, sauf quand il s'agit de traiter de sa crise
interne.
Et pourtant, malgré
ce honteux enlisement, même si on lui a retiré une (faible) partie de ses
moyens, l'association est toujours globalement soutenue et subsidiée par
les pouvoirs publics. Si l’on a pu comprendre au début que l'on
ne condamne pas trop vite une association en difficulté, la situation du MRAX
dure depuis plus de 8 ans et elle n'a jamais fait qu'empirer au point où, ces
derniers mois, les travailleurs dénoncent non plus seulement une mauvaise gestion mais carrément l'absence de direction et de travail et, de ce
fait, l'inutilisation des subsides publics... tout cela sur fond récurrent de
plaintes pour harcèlement moral.
Un bilan politique désastreux
Cette situation
bénéficie tout autant à l'extrême-droite, qu'à une certaine droite populiste,
qui se font régulièrement un plaisir de dénoncer l'inaction du politique, voir
sa complicité. Il y aurait là autant de preuves qui confirmeraient leurs thèses
tantôt poujadistes, tantôt carrément racistes. Le principal intéressé, Radouane
BOUHLAL, l'a parfaitement compris et n'hésite pas à user de la
même rhétorique simpliste pour se défendre. Il a par exemple encore
récemment laissé entendre qu'ACTIRIS s'attaquerait à lui par... racisme. Mais
il y a pire : au sein même des forces progressistes, la
déliquescence du MRAX et l'image déplorable qu'il donne de l'antiracisme,
souffle dans le même sens qu'un vent de scepticisme à l'égard de la défense
d'une société multiculturelle. D'une certaine manière, le pourrissement du MRAX (et, avec lui, le pourrissement de
l’antiracisme) joue dans la
partie francophone du pays le même rôle néfaste à l'encontre du
"vivre-ensemble" que les partis de la droite populiste flamande en
Flandre.
Depuis des
années l'antiracisme bouhlalien a consisté à substituer son combat
originel en faveur du vivre-ensemble pour lui préférer l'exploitation des
tensions communautaires que l'on peut résumer par la formule : fabriquer
une communauté de "victimes" contre les "visages pâles
(sic)" que sont tous les Belges "de souche". En bref, faire de
l'antiracisme au moyen d'une propagande raciste... Au-delà de ses discours nauséabonds,
c'est l'ensemble des pratiques de l'association qui ont été orientées sur cette
voie : les activités du MRAX sont à ce point cloisonnées par groupes
ethnico-raciaux que même en son sein des conflits entre "Noirs" et
"Arabo-Musulmans" ont éclatés. En
permettant au MRAX de rester, avec ce discours et ces pratiques, la
"seule" référence associative subsidiée en matière d'antiracisme, les
pouvoirs publics commettent un crime contre la cohésion sociale du pays.
Heureusement, les subsides "cohésion sociale" dont bénéficiaient le MRAX,
ont eux été supprimés (il s'agit d'une compétence régionale détenue par Charles
PICQUE (PS)). D'autre part, la Ministre de la Culture, Fadila LAANAN (PS),
après les avoir augmentés en 2009, a réduit de moitié la dotation publique en
Education permanente (reste que les subsides actuels sont supérieurs à ceux de
2008 !) et a également commandité une plateforme d'associations destinée à
réfléchir à une alternative. Cependant le MRAX reste encore largement subsidié
aujourd'hui, particulièrement au niveau de l'emploi : une douzaine de
salaires sont toujours financés par ACTIRIS. Et là aucune décision n'a été
prise.
Un bilan social inhumain
Pourtant, ACTIRIS a
déjà largement enquêté au sein de l'asbl et, outre de multiples infractions, a
constaté la persistance d'une situation nuisible pour ses
travailleurs. Depuis de nombreuses années, malgré un turn-over impressionnant
(200%), les travailleurs dénoncent tour à tour leur
"Président-Directeur", Radouane BOUHLAL, qu'ils accusent de plaintes
pour harcèlement moral et un mode de management erratique (Mr Bouhlal passe 1/3
de son temps... au Maroc) et despotique (pressions, intimidations, humiliations
résument son mode de fonctionnement quotidien). Départs et licenciements en
cascade, taux particulièrement élevé d'absentéisme pour maladies, et même
suicide d'un travailleur,... L'état de santé mentale des employés devrait
suffire à justifier la suppression des subsides publics. Malgré les
recommandations d'ACTIRIS en ce sens, aucune décision n'a abouti. Pourquoi ?
Non sans un certain cynisme, certains politiques prétendent en coulisse
qu'ils ne demandent pas à supprimer les dotations publiques pour ne pas mettre
les travailleurs au chômage. Nous savons pourtant que si ACTIRIS recommande de
retirer les postes subsidiés du MRAX, cela ne signifie pas que les travailleurs
soient nécessairement mis en chômage. Il existe des exemples par le passé
où l'Administration, tout en supprimant des postes subsidiés dans une
asbl, a tout simplement déplacé les travailleurs concernés vers d'autres structures.
Cela fait plus de deux ans que la plupart des travailleurs du MRAX réclament le
même traitement. Mais, par lâcheté politique, le Ministre de tutelle
Benoît CEREXHE (CdH) repousse la décision et semble même décidé à ne pas
décider et à ainsi laisser la situation s'empirer.
Calcul et compromission politique
L'inaction du Ministre
régional de l'emploi Benoît CEREXHE résulte probablement d'un calcul électoral
dans son parti. Contaminé par l'idéologie communautariste du MRAX, c'est ici
encore une lecture raciale des citoyens-électeurs qui préside à ce type de stratégies
électorales: On se souviendra que le CdH a largement utilisé BOUHLAL lors des
Assises de l'Interculturalité dans le but à peine voilé de réaliser une
percée électorale au sein des couches populaires dites « d'origine étrangère ».
Pour preuve, à la même époque, le CdH a fait entrer au sein du Conseil
d'Administration du MRAX celle qui était justement en charge de
l'organisation de ces Assises, Véronique LEFRANCQ (CdH, candidate à
Koekelberg), collaboratrice de la Ministre de l'Egalité des chances de l'époque
et initiatrice du projet, Joëlle MILQUET (candidate à Bruxelles-Ville) !
On comprend dès lors pourquoi le CdH soutient apparemment toujours BOUHLAL.Récemment
encore, lors de la dernière Assemblée Générale de juin 2012, le président des
jeunes CdH, Jean-Yves KITANTOU (candidat à Jette), est venu renforcer l’asbl.
Ce
type de compromissions part de l'hypothèse que BOUHLAL aurait la
capacité à nuire électoralement aux partis politiques qui ne le
soutiendraient pas. Cette crainte largement exploitée par l'intéressé depuis
des années, n'a pourtant pas effrayé le PS schaerbeekois qui a
récemment refusé de l'accueillir sur ses listes électorales. Reste cependant
que plusieurs responsables politiques, singulièrement au CdH, semblent animés
par l'idée implicite que la stratégie du laisser-faire et du soutien
implicite au MRAX bouhlalien, ne
ferait que rapporter des voix et donc n'en coûterait aucune.Encore faut-il que
ces malsains calculs restent inconnus des électeurs.
Il ne faut plus sauver le MRAX
Cette
conclusion s'impose aujourd'hui à tous les militants de l'antiracisme. Après tant d'années de tentatives diverses et de faux espoirs, il est devenu
évident que l'on ne peut plus sauver cette association. Surtout, son bilan
social et politique étant devenu à ce point nocif -tant pour les travailleurs
que pour la cohésion sociale, il est maintenant urgent d'y mettre arrêt
définitif, en supprimant intégralement tous les subsides publics dont cette
asbl bénéfice encore. Cela doit se faire sans délai. Cela doit se faire pour
mettre fin aux déviances politiques de cette association. Cela doit se faire
pour sauver des travailleurs à bout de souffle. Cela doit se faire pour
rétablir une saine gestion des finances publiques. Cela doit se faire pour
sauver la mémoire de ses fondateurs. Cela doit se faire pour permettre à de
nouvelles initiatives d'émerger. Cela doit se faire pour donner un nouvel élan
à l'antiracisme. Cela doit se faire pour réhabiliter l'idée que, dans notre
société, on peut vivre et s'épanouir sans race ou tout autre cloisonnement.
Refuser
cette conclusion, par aveuglement ou par calcul ethnico-politique, implique
aujourd'hui que l'on soit complice des tensions inter-culturelles que le MRAX
se plait à exacerber. Soutenir même mollement le MRAX, c'est prendre le
risque d'alimenter des Anders Breivik et leur haine meurtrière d'une
société multiculturelle. Permettre au MRAX de poursuivre
son pourrissement de l'antiracisme revient finalement à faire de lit
de ceux qui sont animés par la haine raciale.